Anthony Burgess (1917-1993), "A Clockwork Orange" (1962, L'Orange mécanique), "Earthly Powers" (1980, La Puissance des Tenèbres), "1985" (1978) - ...

Last update: 12/29/2016


"There was me, that is Alex, and my three droogs, that is Pete, Georgie, and Dim, Dim being really dim, and we sat in the Korova Milkbar making up our rassoodocks what to do with the evening, a flip dark chill winter bastard though dry" (Il y avait moi, c’est Alex, et mes trois droogs, c’est-à-dire Pete, Georgie et Dim, Dim étant très faible, et nous nous sommes assis dans le Korova Milkbar pour préparer nos rassoodocks ce qu’il faut faire avec la soirée, un enfoiré d’hiver froid et sombre bien que sec.)  - "Clockwork Orange" , œuvre la plus célèbre d'Anthony Burgess, est devenue instantanément célèbre en 1971 grâce à l'adaptation cinématographique de Stanley Kubrick. Inspiré par un groupe de blousons noirs brutaux que Burgess avait rencontré à Saint-Pétersbourg, Alex, le narrateur effrayant de ce roman brutal et brillant, est un chef de gang amoureux de Beethoven dans une Grande-Bretagne dystopique dans un proche avenir. La langue qu’il crache est un argot de rue fabriqué par l’auteur multilingue à partir d’un mélange d’éléments (vocabulaire russe et argot cockney) ainsi que des inventions antiques inspirées par tout le spectre de la littérature anglaise, du vers élisabéthain à la poésie Beat. Ce qu’Alex et sa compagnie feront de la soirée, c’est ce qu’ils font toujours : commettre des actes de violence au hasard. Qu’il s’agisse d’adolescentes ou d’une institutrice revenant de la bibliothèque, leurs victimes sont traitées avec un mépris vicieux et exubérant. La bravoure linguistique du livre et la rébellion sans bornes qui est décrite ne cachent pas longtemps l’enquête philosophique sur le bien et le mal au cœur de "A Clockwork Orange". Le tournant est le séjour en prison d’Alex, au cours duquel il se soumet à une thérapie d’aversion en échange d’une libération anticipée.

Bien que cela ne dure pas, la modification comportementale est « réussie », ce qui rend Alex "non violent" — ce qui, précise Burgess, n’est pas exactement la même chose que "bon". Son retour à la forme brutale précède le point culminant inattendu et déconcertant, dans lequel une vision de relations humaines affectueuses tourne les pensées d’Alex vers la tendresse.

Bien qu’il soit souvent comparé à "1984" et à "Brave New World", le livre de Burgess - en partie une vision, à la fois prémonitoire et exagérée, du traumatisme à venir de la culture des jeunes - comporte une couche supplémentaire de surréalisme et de menace.  

 

Anthony Burgess est considéré comme l’un des écrivains les plus originaux et les plus audacieux de la langue anglaise. Son travail est illuminé par une imagination éblouissante. C'est dans "Earthly Powers" qu'il a réellement créé son chef-d’œuvre : au centre se trouvent deux hommes du XXe siècle qui représentent différents types de pouvoir, Kenneth Toomey, éminent romancier, un homme qui a survécu à ses contemporains pour survivre dans une vieillesse honorée, amère et luxueuse en tant que célébrité de notoriété douteuse, et Don Carlo Campanati, un homme de Dieu, finalement bien-aimé Pape, qui se révèle un habile manipulateur pour devenir l’architecte de la révolution de l’église et un candidat pour la sainteté. À travers la vie de ces deux hommes modernes, Burgess explore l’essence même du pouvoir. Au fur et à mesure que chacun poursuit sa carrière, sainteté pour l'un, exil luxueux pour l'autre, leur relation devient le cœur d’un récit qui intègre presque toutes les célébrités et les distinctions dans la vie sociale, littéraire et politique de l’Amérique et de l’Europe. ... 

 


Anthony Burgess (1917-1993)
Burgess, comme Graham Greene et  Evelyn Waugh, est un écrivain catholique anglais hanté par le péché originel et convaincu de la dépravation humaine : il y répond par une véritable comédie de la cruauté (A Clockwork Orange) dans laquelle les villes sont devenues informes, la langue infiltrée de mots argotiques et étrangers, et la culture vécue comme esthétique de la violence.
Né dans une famille catholique de la banlieue de Manchester, Burgess perd sa mère un an après et vit une enfance triste et pauvre avec un père pianiste mais alcoolique. Licencié en littérature, il entend devenir compositeur, est mobilisé de 1940 à 1946, et poursuit une carrière d'enseignant en Angleterre puis en Malaisie jusqu'en 1954.  Burgess vient tard à la carrière d'écrivain et c'est en 1949, qu'il écrit son premier roman, "A Vision of Battlements" (publié en 1965). De 1958 à 1961, il travaille au Sultanat de Brunei. C'est à son retour en Angleterre qu'il publie romans sur romans : "The Long Day Wanes" (Trilogie malaise, 1956-1959),  "A Clockwork Orange" (1962, Orange mécanique), "The Wanting Seed" (1962, La Folle Semence), Beard's Roman Women (1976, Rome sous la pluie), "Earthly Powers" (1980, Les Puissances des ténèbres), "The Kingdom of the Wicked" (1985, Le Royaume des mécréants). Pour des raisons fiscales, il quitte l'Angleterre en 1968 pour Malte, la France, les Etats-Unis, puis Monaco en 1984.


"Time for a Tiger", Anthony Burgess (1956)

L’Empire britannique se désintègre et les dirigeants coloniaux s’éclipsent. Premier livre de la trilogie d’Anthony Burgess sur la Malaisie d’après-guerre (The Long Day Wanes) au moment où les gens et les gouvernements sont perplexes ou éblouis par la tourmente de l’indépendance. Riche en humour et tranchant en observation, le protagoniste de l’œuvre est Victor Crabbe, un enseignant dans une école multiraciale. Suivront "The Enemy in the Blank", publié en 1957,  dans lequel Victor Crabbe devient directeur d’une école dans le sultanat imaginaire de Dahaga dans les années et les mois précédant l’indépendance malaisienne, puis en 1959 "Beds in the East". Avec cette "trilogie Malaisienne", Anthony Burgess reprend la tradtion d'une Greene et d'un Durrel...

 


"A Clockwork Orange" (1962, Orange mécanique)

Le livre a été initialement publié aux États-Unis sans le dernier chapitre de la version britannique, qui détaille le revirement d’Alex; les éditions les plus récentes contiennent le texte original complet de Burgess. 

Chacune des trois parties du roman débute par une énigmatique question posée par le personnage principal, Alex : "What's it going to be, then, eh?" (Qu'est-ce qu'on va faire maintenant, hein?"...

Dans une Angleterre qui est devenue une vaste banlieue aux contours indéfinis, où la dégénérescence a atteint tant la culture que la langue (le roman compte une langue parfois argotique, anglais, américain, russe), Alex, d'une intelligence supérieure, passionné de musique classique et chef d'une bande de voyous, arpente la nuit pour satisfaire ses pulsions les plus sadiques. Après des viols de jeunes filles et de l'épouse d'un célèbre écrivain, rapportés avec un lyrisme jubilatoire et semblant justifié comme un acte de liberté spirituelle dans un monde programmé pour le progrès social et le bonheur, Alex est arrêté et condamné à quatorze ans de prison. Pour bénéficier d'une libération anticipée, il accepte de participer à un programme de réhabilitation basée sur l'aversion : sur une musique de Beethoven, il doit regarder des scènes de violence et ingurgiter une drogue qui lui donne la nausée. Considéré comme guéri, il se retrouve confronté à ses anciennes victimes, sans défense. Incapable de se défendre, il est battu et laissé pour mort dans un champ jusqu'à ce que l'homme qu'il avait roué de coups au début du roman vienne à son secours. À la suite d'une tentative de suicide, les psychologues du gouvernement inversent le traitement Ludovico. Alex retrouve un moment la violence mais, à la fin du livre, il paraît avoir décidé de se maitriser. Le dernier chapitre a été supprimé de l'édition américaine - contre la volonté de l'auteur - parce qu'il a été jugé trop sentimental....

 

 (I, Chapter 1) - "‘What’s it going to be then, eh?’

There was me, that is Alex, and my three droogs, that is Pete, Georgie, and Dim, Dim being really dim, and we sat in the Korova Milkbar making up our rassoodocks what to do with the evening, a flip dark chill winter bastard though dry. The Korova Milkbar was a milk-plus mesto, and you may, O my brothers, have forgotten what these mestos were like, things changing so skorry these days and everybody very quick to forget, newspapers not being much read neither. Well, what they sold there was milk plus something else.

They had no licence for selling liquor, but there was no law yet against prodding some of the new veshches which they used to put into the old moloko, so you could peet it with vellocet or synthemesc or drencrom or one or two other veshches which would give you a nice quiet horrorshow fifteen minutes admiring Bog And All His Holy Angels And Saints in your left shoe with lights bursting all over your mozg. Or you could peet milk with knives in it, as we used to say, and this would sharpen you up and make you ready for a bit of dirty twenty-to-one, and that was what we were peeting this evening I’m starting off the story with.

Our pockets were full of deng, so there was no real need from the point of view of crasting any more pretty polly to tolchock some old veck in an alley and viddy him swim in his blood while we counted the takings and divided by four, nor to do the ultra-violent on some shivering starry grey-haired ptitsa in a shop and go smecking off with the till’s guts. But, as they say, money isn’t everything.

The four of us were dressed in the heighth of fashion, which in those days was a pair of black very tight tights with the old jelly mould, as we called it, fitting on the crutch underneath the tights, this being to protect and also a sort of a design you could viddy clear enough in a certain light, so that I had one in the shape of a spider, Pete had a rooker (a hand, that is), Georgie had a very fancy one of a flower, and poor old Dim had a very hound-and-horny one of a clown’s litso (face, that is), Dim not ever having much of an idea of things  and being, beyond all shadow of a doubting thomas, the dimmest of we four.

Then we wore waisty jackets without lapels but with these very big built-up shoulders (‘pletchoes’ we called them) which were a kind of mockery of having real shoulders like that. Then, my brothers, we had these off-white cravats which looked like whipped-up kartoffel or spud with a sort of a design made on it with a fork. We wore our hair not too long and we had flip horrorshow boots for kicking.

‘What’s it going to be then, eh?’

There were three devotchkas sitting at the counter all together, but there were four of us malchicks and it was usually like one for all and all for one. 

These sharps were dressed in the heighth of fashion too, with purple and green and orange wigs on their gullivers, each one not costing less than three or four weeks of those sharps’ wages, I should reckon, and make-up to match (rainbows round the glazzies, that is, and the rot painted very wide). Then they had long black very straight dresses, and on the groody part of them they had little badges of like silver with different malchicks’ names on them – Joe and Mike and suchlike. These were supposed to be the names of the different malchicks they’d spatted with before they were fourteen. They kept looking our way and I nearly felt like saying the three of us (out of the corner of my rot, that is) should go off for a bit of pol and leave poor old Dim behind, because it would be just a matter of kupetting Dim a demi-litre of white but this time with a dollop of synthemesc in it, but that wouldn’t really have been playing like the game. Dim was very very ugly and like his name, but he was a horrorshow filthy fighter and very handy with the boot.

‘What’s it going to be then, eh?’

The chelloveck sitting next to me, there being this long big plushy seat that ran round three walls, was well away with his glazzies glazed and sort of burbling slovos like ‘Aristotle wishy washy works outing cyclamen get forficulate smartish.’ He was in the land all right, well away, in orbit, and I knew what it was like, having tried it like everybody else had done, but at this time I’d got to thinking it was a cowardly sort of a veshch, O my brothers. You’d lay there after you’d drunk the old moloko and then you got the messel that everything all round you was sort of in the past. You could viddy it all right, all of it, very clear – tables, the stereo, the lights, the sharps and the malchicks – but it was like some veshch that used to be there but was not there not no more. And you were sort of hypnotised by your boot or shoe or a finger-nail as it might be, and at the same time you were sort of picked up by  the old scruff and shook like it might be a cat. You got shook and shook till there was nothing left. You lost your name and your body and your self and you just didn’t care, and you waited till your boot or your finger-nail got yellow, then yellower and yellower all the time. Then the lights started cracking like atomics and the boot or finger-nail or, as it might be, a bit of dirt on your trouser-bottom turned into a big big big mesto, bigger than the whole world, and you were just going to get introduced to old Bog or God when it was all over. You came back to here and now whimpering sort of, with your rot all squaring up for a boohoohoo. Now, that’s very nice but very cowardly.

You were not put on this earth just to get in touch with God. That sort of thing could sap all the strength and the goodness out of a chelloveck.

‘What’s it going to be then, eh?’

The stereo was on and you got the idea that the singer’s goloss was moving from one part of the bar to another, flying up to the ceiling and then swooping down again and whizzing from wall to wall. It was Berti Laski rasping a real starry oldie called ‘You Blister My Paint.’ One of the three ptitsas at the counter, the one with the green wig, kept pushing her belly out and pulling it in in time to what they called the music. I could feel the knives in the old moloko starting to prick, and now I was ready for a bit of twenty-to-one. So I yelped, ‘Out out out out!’ like a doggie, and then I cracked this veck who was sitting next to me and well away and burbling a horrorshow crack on the ooko or earhole, but he didn’t feel it and went on with his ‘Telephonic hardware and when the farfarculule gets rubadubdub.’ He’d feel it all right when he came to, out of the land.

‘Where out?’ said Georgie.

‘Oh, just to keep walking,’ I said, ‘and viddy what turns up, O my little brothers.’..."

 

En 1971, Anthony Burgess connut pour la première fois la grande notoriété lorsque fut porté à l'écran (par Stanley Kubrick, avec Malcolm McDowell, Patrick Magee) le roman (The Clockwork Orange) : il semblait alors constituer un parfait témoignage de cette violence omniprésente et gratuite qui commençait à gangréner les sociétés anglaise et américaine. Mais on peut y voir aussi une critique de l'essor de la culture populaire qui, au début des années 60, produit un nouveau conformisme faussement rebelle. Burgess, quant à lui,  proteste contre les techniques de conditionnement psychologique de |'époque qu'il jugeait odieuses...

 En 1971, le film du roman de Stanley Kubrick est sorti aux États-Unis. Interdit pour son extrême violence dans certaines parties des États-Unis, et par un certain nombre de conseils en Grande-Bretagne quand il est sorti là-bas, le film a soudainement attiré l’attention sur le roman. Il y a eu des tentatives infructueuses pour le retirer de certaines bibliothèques américaines, et un libraire de l’Utah a été brièvement arrêté pour l’avoir vendu. Ironiquement, l’interdiction la plus efficace du film a été de Kubrick, qui en est venu à croire qu’il a inspiré la violence et l’a retiré de la circulation au Royaume-Uni en 1973. Le film n’a été réédité qu’en 2019...


"Tremor of Intent",  Anthony Burgess (1966)

Denis Hillier est un agent britannique vieillissant basé en Yougoslavie. Son vieil ami Roper a fait défection en URSS pour devenir l’un des grands esprits scientifiques de l’empire du mal. Hillier doit ramener Roper en Angleterre ou risquer de perdre son gros bonus de retraite. Aussi pensif que drôle, ce conte moral d’un service secret devenu fou présente le sexe, la gourmandise, la violence, la trahison et la religion. Parmi les personnages étonnants d’Anthony Burgess figurent la prostituée allemande de Roper, Miss Devi et son traité d’amour tamoul, et le grand M. Theodorescu, marchand de secrets international et gourmand lascif. Une combinaison rare du grave mortel et de l’absurde, du noble et du vigoureux....

 


"Inside Mr. Enderby",  Anthony Burgess, 1963

Anthony Burgess se révèle être le plus grand auteur comique des années 1960 et 1970 avec sa trilogie relative à Mr Enderby, poète en déroute dont il retrace les malheurs littéraires, amoureux et digestifs et les triomphes d’Enderby en Angleterre, Rome, Tanger et New York. Après "Inside Mr. Enderby",  en 1963, suivent "Enderby Outside" en 1968, ...

 

Part One - Chapter One

fffrrrummmp.

And a very happy New Year to you too, Mr Enderby!

The wish is, however, wasted on both sides, for this, to your night visitors, is a very old year. We, whispering, fingering, rustling, creaking about your bedroom, are that posterity to which you hopefully addressed yourself.

Congratulations, Mr Enderby: you have already hit your ball smack over the pavilion clock. If you awaken now with one of the duodenal or pyloric twinges which are, to us, as gruesome a literature-lesson spicer as Johnson's scrofula, Swift's scatophobia, or Keats's gallop of death-warrant blood, do not fancy it is ghosts you hear sibilant and crepitant about the bed. To be a ghost one has first to die or, at least, be born.

Perrrrrp.

A posterior riposte from Mr Enderby. Do not touch, Priscilla. Mr Enderby is not a thing to be prodded; he is a great poet sleeping. Your grubby finger out of his mouth, please, Alberta. His mouth is open for no amateur dental inspection but to the end that he may breathe. That nose is, at fortyfive, past its best as an organ, the black twitching caverns—each with its miniature armpit—stuffed and obtuse. The world of smell is visited by his early poems, remember (pages 1 to 17 of the Harvard University Press selection which is your set book). There we have washed hair, pickles, gorse, bath-salts, skin, pencil-shavings, tinned peaches, post offices, Mrs Lazenby at the corner-shop in his native slum, cloves, diabetes. But it has no existence in his maturer work; the twin ports are closed for ever. That gentle noise,

Harold, is snoring. That is so, Christine; his teeth, both upper and lower, are removable: they have been removed to that plastic night-jar there. Child, child, you have spilt denture-fluid on to Mr Enderby's landlady's carpet. No, Robin, the carpet is neither beautiful nor rare, but it is Mrs Meldrum's property. Yes, Mr Enderby himself is our property, the world's property, but his carpet is his landlady's. Mrs Meldrum's.

 

... puis en 1974, "The Clockwork Testament, Or, Enderby’s End".  Le caractère choquant et provocateur du film Orange mécanique de Stanley Kubrick ne manqua pas de susciter des réactions hostiles lors de sa sortie, même si par ailleurs beaucoup de critiques en saluaient la richesse visuelle et musicale. Anthony Burgess, qui avait participé à la campagne de promotion du film dans les médias, fut lui aussi mis en accusation en tant qu’auteur du roman original. Il se défendit d’avoir fait l’apologie de la violence et présenta son roman comme un “sermon chrétien”, mais la campagne de presse se poursuivit en 1972 et 1973, années au cours desquelles plusieurs faits divers atroces furent attribués à l’influence néfaste du film et du roman. Anthony Burgess transposa cette expérience pénible dans son dernier roman de la série des Enderby, "Le Testament de l’orange", publié en 1973. Le roman raconte les mésaventures d’Enderby, obscur écrivain qui a adapté pour le cinéma un poème de G.M. Hopkins, "Le Naufrage du Deutschland". Le cinéaste qui a utilisé son script en a fait une scabreuse histoire de jeunes nazis violant des religieuses, et le pauvre Enderby est sans cesse sommé de s’expliquer et de se justifier....

 


"Earthly Powers" (1980, Les Puissances des ténèbres)
"Tout le XXe siècle passe dans ces Puissances des ténèbres, emportant le lecteur dans sa chevauchée fantastique. Le génie de Burgess est d'avoir concentré l'écho du gigantesque fracas en deux personnages : un écrivain curieux et voyageur et un prêtre qui, devenu son parent par alliance, finira pape. Truculent, la tête dans le ciel, l'homme de foi mène sans répit la bataille contre le Malin. « Sacrée bataille », dit-il, mais sans douter un instant de la victoire finale du bien. A-t-il raison ? A-t-il tort ? Autour de lui, le monde étend ses ravages. L'odeur de Buchenwald imprègne encore l'air. Un fou de Dieu, enfant miraculé, provoque un carnage au nom de l'Amour, car le Malin peut aussi prendre la forme de l'amour. Cynisme et drôlerie, courage et veulerie, complaisance et exigence... Les Puissances des ténèbres est le livre de tous les contrastes et nous renvoie à un temps ou la littérature était colossale, effarante, bref sublime." (Editions Robert Laffont) 

"C'était l'après-midi de mon quatre-vingt-unième anniversaire, et j'étais au lit avec mon giton, lorsque Ali vint m'annoncer la visite de l'archevêque.

- Très bien, Ali, chevrotai-je (je m'exprimais en espagnol, de la chambre de maître dont la porte était close). Conduis-le au bar et sers-lui à boire.

- Hay dos. Su capellan también.

Il y a douze ans que j'ai pris ma retraite de la profession de romancier. Cependant, quiconque ayant une petite idée de mon œuvre et se donnant la peine de relire ma première phrase devra bien reconnaître que je n'ai pas perdu une miette de ma vieille habileté à tourner ingénieusement ce qu'il est convenu d'appeler une entrée saisissante dans le vif du sujet. Pourtant il n'y a là au fond nulle ingéniosité. Parfois l'actualité se prête aux jeux de l'art. Que j'eusse quatre-vingts ans, je ne pouvais guère en douter: toute la matinée les télégrammes de félicitations n'avaient cessé de m'en pénétrer. Geoffrey, qui enfilait déjà son pantalon de toile trop collant était en effet, selon toute hypothèse, mon Ganymède ou mon amant autant que mon secrétaire. Et le mot espagnol arzobispo signifie sans conteste archevêque. L'heure ? Peu après 4 heures, un après-midi de juin à Malte - le 23 juin pour être exact et pour épargner à ceux que cela intéresse vraiment l'ennui d'avoir à consulter le Who's Who.

Geoffrey transpirait trop et courait droit à l'embonpoint (paradoxe, car Geoffrey ne courait jamais). L'existence, imaginais-je, était trop facile pour ce garçon de trente-cinq ans. Bah, l'heure de notre séparation ne pouvait plus guère tarder; Ia nature s'en chargerait, Geoffrey n'éprouverait aucun plaisir à assister à la lecture de mon testament: « Mon cher, quelle vieille garce! Quand on pense à tout ce que j'ai fait pour lui. » Et moi, donc - mais à ma manière, c'était vrai, posthume, oui, posthume.

Je demeurai encore étendu un court moment, nu. tavelé. Jaum, émacié, à fumer une cigarette qui eût dû être postcoïtale, mais ne l'était pas. Geoffrey chaussa ses sandales en soufflant, l'estomac cassé en trois bourrelets de graisse, puis il mit sa saharienne à fleurs. Pour finir, il se dissimula derrière ses lunettes de soleil, qui étaient de cette espèce insolente dont les convexités renvoient au monde des éclairs de miroir métallique. J'y distinguai avec une netteté incroyable mon visage et mon cou de quatre-vingt-un ans : la fameuse sévérité rassise de qui a vécu avec une rare intensité sa vie, les tendons décharnés pareils à des câbles, l'anatomie des mâchoires, la cigarette "Fribourg and Treyer" au bout de son porte-cigarette Dunhill, me reliant à un âge où fumer était un acte qui se piquait d'élégance. Je considérai sans rancœur la double image, pendant que Geoffrey disait:

- Je me demande ce que Son Archevêcherie peut bien vouloir. Peut-être te remettre en mains propres une bulle d'excommunication. Sous emballage cadeau, naturellement.

- Avec soixante ans de retard, dis-je.

Je tendis à Geoffrey la cigarette à demi fumée pour qu'il l'éteignît dans un des cendriers d'onyx, et je remarquai combien il rechignait même à ce petit service. Je sortis du lit, nu, tavelé, jauni, émacié. Mon pantalon de toile était, selon les principes de la décence, loin de l'étroitesse. Et si les bégonias et les orchidées de la chemise étaient ridicules sur un homme de mon âge, il y avait beau temps que je m'étais immunisé contre les ricanements venimeux de Geoffrey en lui rétorquant: "Cher enfant, je dois bien m'habituer à la perspective de floralies révérentielles." La formule datait de 1915. Je l'avais entendue au Lamb House, à Rye; mais c'était moins du pur (echt) Henry James que du Henry James parodiant du pur (echt) Meredith - en mémoire de 1909 et d'une certaine dame qui avait envoyé à ce dernier trop de fleurs. "Floralies révérentielles, ho, ho, ho", avait raillé James, se complaisant dans un pastiche de gaieté.

- Les félicitations des fidèles, alors, dit Geoffrey.

Je ne trouvai pas du tout à mon goût sa façon d'aspirer le mot et l'accent qu'il lui avait imprimé de ce fait. J 'y reniflais un parfum de sexualité en même temps que l'odeur impudique de ses propres infidélités; c'était un terme dont je m'étais servi moi-même à son endroit, un jour, en pleurant, et il restait chargé pour moi de tout le sérieux d'une morale traditionnelle digne tout au plus d'une plaisanterie au sous-entendu obscène pour la génération de Geofrey.

- Les fidèles, lui retournai-je sur le même ton, ne sont pas censés lire mes livres. Pas ici, sur l'ile sainte de saint Paul. Ici, je suis un immoraliste, un anarchiste, un agnostique et un rationaliste. Je crois deviner ce que veut l'archevêque. Et son désir vient justement de ce que je suis tout cela.

- Plus malin qu'un vieux diable, hein ?

Ses verres réfléchissants captèrent des reflets de pierre dorée provenant de la Triq Il-Kbira, c'est-à-dire Rue la Grande ou Grand-Rue, par l'embrasure de la fenêtre. Je dis:

- Il y a en bas, dans ce que tu appelles ton bureau, beaucoup de correspondance négligée. Ècœuré par ta fainéantise, j'ai pris sur moi d'ouvrir une lettre ou deux, encore chaudes des mains du facteur. L'une d'elles portait le timbre du Vatican.

- Ah, va te faire foutre, dit-il en souriant (du moins me semblat-il : bien évidemment, je ne pouvais voir ses yeux).

Puis, singeant mon léger zézaiement, il reprit en écho:

- Écœuré par ta fainéantise... Va te faire foutre! répéta-t-il ensuite, cette fois d'un ton boudeur.

- Je crois, dis-je, entendant mon chevrotement frêle et sénile et le détestant. Je crois, oui, que je ferais mieux de dormir seul à l'avenir. Cela siérait mieux à mon âge.

- Tiens donc, enfin l'on regarde les choses en face, très cher ?

- Pourquoi, dis-je tremblant de me voir dans le grand miroir mural bleu et rabattant en arrière mes mèches clairsemées, oui, pourquoi t'arranges-tu pour que les choses prennent cet accent sale et mesquin dans ta bouche ? Chaleur. Confort. Amour. Tu trouves que ce sont des mots sales ? Amour, amour. C'est sale ?

- Le cœur, très cher, dit Geoffrey, cette fois encore avec un sourire, me parut-il. La pompe n'est plus toute jeune, il faut la surveiller, n'est-ce pas ? Très bien, chacun de nous dormira dans son lit séparé. Et si tu appelles, la nuit, qui t'entendra ?

Wer, wenn ich schrie... Qui donc avait dit ou écrit cela ? Mais le grand Rilke, lui-même, bien sûr, le pauvre. Mort aujourd'hui. Il avait pleuré en ma présence dans une méchante brasserie de Trieste, non loin de l'Aquarium. Les larmes lui ruisselaient du nez, qu'il essuyait à sa manche.

- Tu as toujours réussi à dormir assez profondément près de mon sommeil laborieux, dis-je. Assez profondément pour rester insensible même au doigt que je t'enfonçais dans les côtes. (Et puis, avec un trémolo honteux :) Fidèle, fidèle... !

Je sentais revenir les larmes, sous le poids douloureux de ce mot. Je me souvins du malheureux Winston Churchill qui, vers ce même âge, se prenait à pleurer à des mots tels que grandeur. Je crois que l'on appelle cela instabilité émotive. Maladie de vieux. La bouche de Geoffrey ne forma même pas un sourire, cette fois, pas plus que sa mâchoire ne se crispa pour signifier une hargne molle. Le bas de son visage témoigna d'une sorte de compassion tandis que le haut me renvoyait mon image jumelle : j'étais deux fois brisé. Pauvre vieux bougre, se dirait-il à lui-même et dirait-il peut-être plus tard à un ami ou à un de ses lèche-cul, au bar du Corinthia Palace Hotel. Pauvre vieille lope. Tout seul avec son impuissance, sa décrépitude et sa sénilité. Pour l'instant, c'était, avec un aimable entrain:

- Allons, très cher. Ta braguette est-elle bien fermée ? Bravo !

- Pour ce que l'on en verrait, sous tant de fleurs.

- Superbe ! Or çà donc, mettons le masque de l'auteur et de l'immoraliste distingués. Son Archevêcherie attend. 

Là-dessus, il ouvrit la lourde porte donnant droit sur le vaste salon de l'étage. A mon âge, je pouvais, je peux supporter toutes les brutalités de la lumière et de la chaleur, et l'une comme l'autre, avec cette férocité particulière aux régions méridionales, déferlaient, tel un finale de Rossini en stéréophonie, par les fenêtres grandes ouvertes et sans volets. A droite, les toits et les lessives hautes en couleurs de Lija, un autobus qui passait, des enfants querelleurs ; à gauche, par-delà les cristaux, la statuaire et la terrasse supérieure, montant du jardin, le sifflement et le ronronnement de la pompe qui irriguait mes orangers et mes citronniers.

En d'autres termes, j'entendais la vie poursuivre son cours ; c'était un réconfort. Nous foulâmes du marbre frais, une épaisse peau d'ours blanc, du marbre encore, de la fourrure, du marbre. Là-bas au fond, le clavecin William Foster, que j'avais acheté pour mon précédent ami et secrétaire, Ralph, infidèle, avec ses quelques cordes médianes brisées par Geoffrey lors d'une nuit d'orage. Aux murs, des peintures, œuvres de grands, mes contemporains, tous - aujourd'hui fabuleusement précieuses, mais acquises pour des bouchées de pain à l'époque où, pourtant jeune encore, j'étais, moi, enfin sorti de la mêlée. Et aussi des vitrines exposant des jades, des ivoires, des verreries, des métaux: bibelots ou objets d 'art. Ah ! comme ces mots de la langue française, tout en avouant leur trivialité, les en purifiaient en quelque sorte. Fruits tangibles de la réussite, le vrai combat, où l'on se collette avec la forme et l'expression, restant, lui, éternellement douteux. Oh, mon Dieu... le vrai combat ? Je pensais en écrivain, non pas en être humain, même sénile. Comme si la conquête du langage avait de l'importance ! Comme si, à la fin des fins, il existait autre chose de plus important que des clichés. Fidèle. Tu as manqué à la fidélité. Tu t'es laissé glisser, tomber dans l'infidélité. Ma conviction est que l'on doit être fidèle à ses croyances. Adeste fideles. A Noël, cela pouvait encore éveiller une nostalgie mouillée de larmes. La reproduction, dans le cabinet chirurgical de mon père, de cette horreur - mais de quel droit la qualifiais-je d'horreur ? - illustrant l'anecdote de la sentinelle morte à son poste, les yeux grands ouverts sur l'écroulement de Pompéi. Fidèle jusqu'à la mort. Les félicitations des fidèles, soit. Le monde de l'homosexualité a son langage complexe, délicat et pourtant parfois d'une acuité atroce dans sa précision, façonné d'après des clichés appartenant à l'autre monde. Ainsi donc, cher maître, ce sont là les fruits tangibles de votre réussite.

Geoffrey traînait les pieds à mon pas, par dérision, comme pour mieux souligner son, très cher, rôle d'aide pédonculaire. Côte à côte, pied à pied, avec une régularité comique, nous descendîmes la première volée de marbre. Nous arrivâmes à un palier spacieux orné d'une armoire XVIIe anglais dissimulant d'exquis cristaux - desquels on use, mon cher, couramment, pour les exhiber, s'imbiber, abreuver- et une table de tric-trac XVIIIe, dont l'échiquier était constamment garni de figurines humaines en obsidienne du Mexique (pour la parade uniquement, mon cher: il y a beau temps qu'il a passé l'âge des jeux), puis primes à droite pour nous engager dans l'ultime cataracte de marbre. Je jetai un regard sur la pendule maltaise dorée, au mur de l'escalier: elle indiquait près de 3 heures.

- Personne n'est venu la remettre en ordre, dis-je, conscient de l'irritation de ma voix. Cela fait maintenant trois jours. Oh, je sais, je sais, nous n'en mourrons pas...

Nous étions à trois degrés du bas. Geoffrey tapota du doigt la pendule comme s'il s'était agi d'un baromètre. puis, méchamment, fit mine de lui décocher un coup de poing.

- Quel sale endroit ! Je déteste cette saleté d'endroit, je l'abhorre.

- Il y faut le temps, Geoffrey.

- Nous aurions pu aller ailleurs. Il y a d'autres îles, puisque tu tiens à une saleté d'île.

- Pas maintenant, dis-je. Nous avons des visiteurs.

- Vacherie ! Nous aurions très bien pu rester à Tanger. Nous aurions eu le dernier mot avec ces salauds.

- Nous ? C'est toi, Geoffrey, qui avais les ennuis ; pas moi. 

- Qui diable t'empêchait de faire quelque chose ? Fidèle! Tu peux toujours me la jeter à la figure, ta fidélité.

- Mais j'ai fait quelque chose: je t'ai sorti de Tanger.

- Pourquoi m'avoir traîné ici, dans cette saleté d'endroit ?

Avec ces saletés de prêtres et de flics qui sont comme cul et chemise.

- Il y a deux saletés de prêtres qui nous attendent. Un peu de modération, je te prie.

- Tu as peut-être envie de crever ici, moi foutrement pas.

- Il faut bien mourir quelque part, Geoffrey. Malte me semble une sorte de compromis raisonnable.

- Pourquoi -refuses-tu de mourir dans cette saloperie de Londres ?

- Les impôts, Geoffrey. Les droits de succession. Le climat. 

- Bordel de Dieu de merde, au diable cette putain de saloperie !

Je descendis à petits pas comptés les trois dernières marches menant au grand vestibule ; il suivit, se contentant maintenant de jurer et de pester sous cape. A deux mètres de là, sur un plateau d'argent qu'embellissait une coupe chinoise pleine de fleurs de saison, s'amoncelait un arrivage tout frais de félicitations, apporté par les petits télégraphistes motorisés sur deux roues. Le bar était à l'autre bout du vestibule, sur la droite, entre la pétaudière du bureau où Geoffrey négligeait son secrétariat et mon propre cabinet de travail, maniaquement rangé. Au mur qui séparait du bar cette dernière pièce, le Georges Rouault - une ballerine laide et comme gribouillée à gros traits noirs impatients, lavés de couleurs cruelles. A Paris, à l'époque, Maynard Keynes m'avait ardemment recommandé de l'acheter Il connaissait le marché comme sa poche...." (traduction G.Belmont et H.Chabrier)

 

Le narrateur de ce roman-fleuve est un certain Toomey, homme de lettres homosexuel et octogénaire, qui vit retiré dans l'île de Malte et nous livre le récit, par potins et ragots interposés, de sa traversée du siècle. Vaste fresque, mêlant le fait divers sordide et le tragique de l`histoire, le roman embrasse la totalité des fréquentations de son personnage,

pour le meilleur et pour le pire. Défile, mais vue par le petit bout de la lorgnette, une ahurissante galerie de célébrités mondaines et littéraires, à la faveur du procédé (trop systématiquement appliqué ici) consistant à mêler faits historiques avérés et histoires imaginées de manière à authentifier le texte de fiction. Davantage qu`au roman, la méthode

s'apparente à l'autobiographie : d'ailleurs Toomey. aux opinions très arrêtées sur l'art moderne, qu`il dénigre systématiquement et avec une mauvaise foi confondante, n'est pas sans rappeler la figure de Burgess lui-même qui trouve ici un masque à sa dimension, ainsi qu'une tribune depuis laquelle il peut régler ses comptes en public. Dans un esprit de compétition avec les plus grands, T. S. Eliot, Joyce, mais aussi Shakespeare, il revendique un statut d`héritier majeur ou, à défaut, la condition de l'usurpateur sans scrupule, qui s'insère dans la trame d' "Ulysse" ou se glisse dans la peau du Tirésias de "La Terre vaine". Récitant génial autant que faussaire hors pair, il fait défiler toute l'histoire de la littérature anglaise de Chaucer à Henry James en vertu des pouvoirs particuliers qui sont les siens : les puissances des ténèbres qu'évoque le titre français, qui sont en fait les forces terrestres, par opposition sans doute aux forces célestes auxquelles commande son alter ego, le prélat Carlo Campanati, figure transparente du pape Jean XXIII. Mais l'opposition n'en est pas une : les pouvoirs surnaturels (d`exorcisme entre autres) de l`homme d'Eglise trouvent un évident corolaire dans l'écriture romanesque de Toomey, passionnément épris de l'humaine comédie et aspirant à rehausser le mondain et le séculier. En contrepoint de cette grande parade hollywoodienne, résonnent les accents plus graves d`une conscience hantée par la malédiction homosexuelle et rongée par l'éternelle question (chez Burgess) du libre arbitre et du caractère mêlé du mal et du bien. De rage de n'avoir pu être le premier à écrire la Genèse (parce qu'elle décrit la "naissance du langage"), Toomey la réécrit en tant qu'hérésie homosexuelle. Démiurge, car c`est bien ainsi qu`il se rêve, habité par le don des langues, à croire qu'il le tient de l'Esprit-Saint, il se complaît dans le trivial bouffon et obscène pour mieux se masquer sa déception d'être passé à côté du sublime. (Trad. Acropole, 198&).