Graham Greene (1904-1991), "The Confidential Agent" (1939), "The Power and the Glory" (1940) - Nancy Mitford (1904-1973) - .....
Last update: 12/29/2016
Graham Greene (1904-1991)
Né à Berkhamsted, près de Londres, fils du directeur de l'école, Graham Greene fait ses études à Oxford, mais connaît une enfance difficile qui lui laisse
un sentiment de vide qu'il comblera en parcourant le monde, la violence, la misère, et l'on retrouve dans ses romans nombre de héros ambigus luttant contre la corruption, le mal, tentant de
sauver autrui ou de se sauver eux-mêmes de la déchéance et de l'absurdité ... mais pour s'enliser, sans rémission apparemment possible. Greene se convertit au catholicisme (1926), épouse
Vivien-Dayrell-Browning (1927), tient des critiques littéraires, puis en 1935, voyage au Libéria et au Mexique : "A Gun for Sale" (1936, Tueur à gages), "Brighton Rock" (1938, Rocher de
Brighton), "The Confidential Agent" (1939, L'Agent secret), "The Power and the Glory" (1940, La Puissance et la Gloire). Recruté au MI6 par le célèbre agent double Kim Philby, il travaille pour
le Foreign Office entre 1941 et 1943 au Sierra Leone. Suivent : "The Ministry of Fear" (1943, Le Ministère de la peur), "The Heart of the Matter" (1948, Le Fond du problème), "The Third Man"
(1949, Le Troisième Homme), "The End of the Affair" (1951, La Fin d'une liaison), "The Quiet American" (1955, Un Américain bien tranquille), "Loser Takes All" (1955, Qui perd gagne), "Our Man in
Havana" (1958, Notre agent à La Havane). Aux quatre coins du monde, participant à nombre de polémiques et de protestations libertaires, Graham Greene publie vingt-six romans diffusés à plus de
vingt millions d'exemplaires et traduits en quarante langues. L'homme traqué de "The Confidential Agent" porte en lui quelques-unes des
obsessions de Graham Greene : l'horreur du contact physique, la solitude totale contre laquelle se brise tout effort des innocents (une petite servante d'hôtel qui veut l'aider est assassinée).
Derrière une banale chasse à l'homme que pourrait parfaitement dérouler un Peter Cheney, se dessine la figure menaçante du destin, masque de désespoir qui cache à la fois le simple abandon d'un
homme à la cruauté de ses adversaires et le délaissement de la créature oubliée de Dieu...
"Brighton Rock" (1938, Le Rocher de Brighton)
"Le Rocher de Brighton est une spécialité de la célèbre plage anglaise, un sucre d'orge que l'on peut casser en n'importe quel endroit et qui permet de
toujours lire le nom de Brighton sur la cassure. Si l'on se demande pourquoi Graham Greene a donné comme titre à son roman le nom de cette sucrerie, on trouvera peut-être la réponse dans les
parole d'un de ses personnages: "Regardez-moi. Je n'ai jamais changé. C'est comme ces bâtons de rocher; mordez-les tout du long, vous lirez toujours Brighton. C'est la nature humaine". En
apparence, « Rocher de Brighton» est un roman policier. Mais il détient un sens secret. Car entre le Gamin, jeune bandit de dix-sept ans à la cruauté sadique et au charme envoûtant, Rose, la
jeune fille qui se donne à lui malgré le danger qu'il incarne, et Ida, qui symbolise et défend le droit à tout prix, va se jouer un drame de vengeance, de cruauté et de mort marqué par la justice
divine et la damnation éternelle." (trad. éditions Robert Laffont)
"The Confidential Agent" (1939, L'Agent secret)
Composé en six semaines et inspiré par la guerre d'Espagne , l'aventure de D., agent secret traqué dans un monde hostile et incompréhensible dépasse le simple récit de suspense... Au terme d'un voyage qui ressemble à une poursuite, D. atteint la sinistre pension de famille de Gabitas Street, à Londres. Sa dangereuse propriétaire au visage tâché et aux mains énormes, la petite servante Else et son destin tragique, l'hindou à la robe de chambre bariolée, Lord Benditch et sa galerie de portraits de courtisanes, Fortesque et son air de vieil adolescent, Rose Cullen, indifférente et peut-être redoutable : tous ces personnages se croisent et disparaissent dans les brumes anglaise. Fidèle à la foi qu'il a en l'homme, Graham Greene termine cependant les tribulations de l'agent secret sur une note d'espoir.
"Les mouettes balayaient le ciel de Douvres. Elles se détachaient comme des flocons arrachés au brouillard et viraient pour retourner vers la ville cachée, tandis que la sirène se lamentait avec elles ; d'autres bateaux répondirent et tout un chœur de lamentations s'éleva (pour la veillée de quel mort ?). Le bateau avançait à demi-vitesse dans le soir d'automne aigre. D. se mit à penser à un corbillard qui roule lentement et discrètement vers le « champ de repos », et dont le conducteur prend grand soin de ne pas secouer le cercueil, comme si un ou plusieurs cahots allaient incommoder le corps. Des cris aigus de femme énervée traversaient les haubans. Le bar des troisièmes était plein à craquer : une équipe de rugby rentrait en Angleterre et les jeunes gens, arborant des cravates à rayures, se bousculaient bruyamment pour attraper leurs verres. D. ne comprenait pas toujours les mots qu'ils criaient : peut-être était-ce de l'argot, ou un dialecte ; il lui faudrait un peu de temps avant de retrouver complètement le souvenir de la langue anglaise; il l'avait très bien parlée autrefois mais maintenant ses connaissances étaient devenues un peu trop littéraires. Il essaya de s'isoler, cet homme entre deux âges, à la lourde moustache, avec une cicatrice au menton, et le souci plissant son front, comme un tic, mais l'on ne pouvait guère se tenir à l'écart dans ce bar - un coude lui entra dans les côtes et une bouche lui souffla au visage un relent de bière en bouteille. Ces gens le remplissaient d'un sentiment de stupéfaction; on n'aurait jamais pu se douter, à les voir si bons vivants dans la fumée de leurs cigarettes, qu'il y avait une guerre en ce moment - pas seulement dans le pays qu'il venait de quitter, mais la guerre ici, à un demi-mille de la jetée de Douvres. Il transportait la guerre avec lui. Partout où D. se trouvait, il y avait la guerre. Il n'avait jamais pu comprendre comment les gens ne le sentaient pas.
- Faites circuler, faites circuler! cria l'un des joueurs au barman.
Et quelqu'un s'empara de son verre de bière en hurlant :
- Hors jeu!
- Mêlée! répondirent-ils tous à tue-tête.
- Avec votre permission, dit D., avec votre permission.
Et il se faufila dehors; Il remonta le col de son imperméable et monta sur le pont du bateau plongé dans le brouillard glacé, où les mouettes qui filaient sur Douvres poussaient leurs cris lugubres au-dessus de sa tête. Il se mit à battre la semelle, de long en large, en suivant la rambarde pour se réchauffer, tête baissée vers les planches du pont sur lesquelles ses yeux voyaient une carte semée de tranchées, de positions intenables, de saillants, de morts; des bombardiers décollaient d'un point situé entre ses yeux et dans son cerveau les montagnes tremblaient sous les éclatements d'obus.
Aucune sécurité me lui venait à faire les cent pas le pont de ce bateau anglais qui d'un imperceptible glissement entrait dans le port de Douvres. Le danger faisait partie de lui-même. Ce n'était pas un pardessus qu'on peut laisser à la maison, c'était sa propre peau. L'on meurt avec cette peau : seule, la corruption vous en dépouille. L'unique personne à qui l'on puisse se fier, c'est soi-même. On trouvait sur le cadavre d'un ami, sous sa chemise, une médaille bénite; un autre ami appartenait à une organisation qui ne portait pas les initiales qu'il aurait fallu. De long en large, sur ce pont des troisièmes exposé à tous les vents, d'arrière en avant et d'avant en arrière, jusqu'à l'endroit où sa marche était interrompue par un écriteau : « Réservé aux Passagers de Première Classe. » Il fut un temps où la distinction de classes lui serait apparue comme une insulte, mais à présent les classes sociales étaient subdivisées trop de fois pour que la chose eût un sens quelconque. Il fixa des yeux le pont des premières; il n'y avait dans le froid qu'un seul homme comme lui-même : col remonté, il se dressait à l'avant du bateau et regardait vers Douvres.
D. tourna les talons et regagna l'arrière, et au rythme régulier de son pas, les avions de bombardement reprirent leur vol. Vous ne pouvez être sûr que de vous-même et par moments vous vous demandez si après tout vous n'avez pas tort d'en être sûr...."
"The Power and the Glory" (1940, La Puissance et la Gloire)
Un prêtre déchu et ivrogne assume jusqu'au martyre son ministère dans un Mexique révolutionnaire qui persécute l'Église. "La Puissance et la Gloire est le
sommet des romans catholiques de Graham Greene. Il lui fut inspiré par un séjour au Mexique en 1937. Le clergé mexicain persécuté par le gouvernement révolutionnaire, il ne reste qu'un seul
prêtre, dont la tête est mise à prix. Ce prêtre est un pauvre homme qui aime trop l'alcool et qui a fait un enfant à une de ses paroissiennes. Il essaie de fuir mais revient chaque fois qu'un
mourant a besoin de lui, « et même lorsqu'il croit que son secours sera vain, et même lorsqu'il n'ignore pas que c'est d'un guet-apens qu'il s'agit et que celui qui l'appelle l'a déjà trahi, ce
prêtre ivrogne, impur, et tremblant devant la mort, donne sa vie sans perdre à aucun moment le sentiment de sa bassesse et de sa honte » ( François Mauriac ). Extraordinaire roman, La Puissance
et la Gloire connut dès sa parution un succès retentissant et reste l'oeuvre la plus forte du grand écrivain anglais." (Livre de poche)
"The Ministry of Fear" (1943, Le Ministère de la peur)
"Londres durant le Blitz. Un homme devine le poids d'un gâteau dans une fête foraine, il devient malgré lui propriétaire du microfilm caché à l'intérieur...
L’aventure d’Artur Rowe aux prises avec les mystérieux fonctionnaires du Ministère de la Peur organisé par les Allemands au cœur de Londres pendant le « Blitz » relève du roman policier ou du
roman d’espionnage. Mais comme toujours avec Greene, le drame d’Artur Rowe, cet homme qui autrefois a tué pour mettre fin à la souffrance d’un être qu’il aimait, c’est le drame de l’homme à la
recherche de l’absolu. Il tombe dans les filets des magistrats du Ministère de la Peur. Parviendra-t-il à leur échapper ? Parviendra-t-il à trouver la paix et l’amour qu’il recherche ?" (Editions
Robert Laffont)
"The Heart of the Matter" (1948, Le Fond du problème)
"Un représentant de la loi, rongé par l'angoisse et l'ennui en Afrique occidentale, se suicide pour laisser place nette à l'amant de sa femme. "Pendant la
Seconde Guerre mondiale, Scobie vit dans un petit comptoir colonial de la Sierra Leone avec sa femme Louise. Mais tant d'années de mariage ont eu raison de la passion et la perte de leur fille
âgée de neuf ans a laissé Louise inconsolable. Lorsque celle-ci décide de partir pour l'Afrique du sud, Scobie se retrouve seul et fait la rencontre de la jeune Helen : il en tombe aussitôt
éperdument amoureux."
"The Third Man" (1949, Le Troisième Homme)
"1949 : Vienne est occupée par les quatre puissances victorieuses. Les carcasses calcinées des chars gisent au pied de la Grande Roue. Dans un décor de
ruines enneigées, Rollo Martins part à la recherche de son ami Harry Lime, mystérieusement disparu, pour découvrir que celui-ci est devenu un odieux trafiquant de pénicilline. De ce suspense
parfait, Carol Reed a tiré un film inoubliable également intitulé Le Troisième Homme – avec Orson Welles et Joseph Cotten –, qui demeure l’un des sommets de l’art cinématographique. Première
désillusion évoque le choc et la terreur éprouvée par un enfant quand, pour la première fois, il se trouve confronté, au cours d’une affaire tragique, au monde des adultes. Il découvre alors
l’amour, la peur, la lâcheté." (Livre de poche)
"The End of the Affair" (1951, La Fin d'une liaison)
Un des romans les plus autobiographiques de Graham Greene et histoire en trompe-l'oeil sur le tiraillement d'une femme entre son amour illégitime et Dieu: dans la passion, on finit toujours par tuer ou être tué. "Londres, janvier 1946. Maurice Bendrix, écrivain, rencontre par hasard son ami Henry Miles, diplomate, qu'il n'avait plus vu depuis un an et demi. Henry est marié à Sarah avec qui Bendrix a eu une liaison. Il avait rencontré le couple à l'été 1939 et Sarah l'avait tout de suite attiré par sa beauté et son air heureux. Après quelques années d'une passion intense, un obus frappa la maison ou ils se donnaient rendez-vous. Après avoir cru Bendrix mort, Sarah l'a vu réapparaître vivant mais, bouleversée, elle met brutalement fin à leur histoire sans un mot d'explication. Lors des retrouvailles des deux hommes, Henry confie à l'écrivain rempli de haine qu'il est inquiet. Il a le sentiment que son épouse le trompe. Rongé par la curiosité et la jalousie, Maurice tente de convaincre Henry d'engager un détective privé pour s'assurer de la fidélité de sa femme, mais Henry n'ose pas. Bendrix décide alors d'engager lui-même un détective. Au terme de son enquête, ce dernier lui remet le journal de Sarah. Il comprend enfin le revirement inexplicable de sa maîtresse le jour fatidique de leur rupture." (Editions Laffont, traduit par Marcelle Sibon). Edward Dmytryk, en 1955, avec Deborah Kerr et Van Johnson, puis Neil Jordan, en 1999, avec Julianne Moore et Ralph Fiennes, en réalisèrent une adaptation cinématographique.
"Une histoire n'a ni commencement, ni fin. Nous choisissons arbitrairement un point précis de notre expérience et, partant de ce point, nous regardons en arrière ou en avant. Je dis : « nous choisissons » avec cet orgueil erroné de l'écrivain de métier qui - dans les rares occasions où il fut vraiment pris au sérieux - se vit complimenter pour son habileté technique; mais, à vrai dire, est-ce bien de ma propre volonté que je "choisis" cette soirée sombre et mouillée de janvier 1946 et le moment où, sur les Allées, je vis Henry Miles traverser en biais le large fleuve de l'averse; et ces images ne m'ont-elles pas plutôt choisi? Il est commode, il est correct pour respecter les règles de mon métier, de commencer exactement là, mais si, à cette époque, j'avais cru en un Dieu, n'aurais-je pas pu croire aussi qu'une main m'avait touché le coude et qu'une voix avait murmuré à mon oreille : "Parle-lui. Il ne t'a pas encore aperçu".
Car, pourquoi lui aurais-je parlé? Si le mot haine n'est pas trop fort pour qu'on l'applique à un être humain, je haïssais Henry et je haïssais aussi sa femme, Sarah. Et lui, je suppose, se mit à me haïr peu de temps après les événements de ce soir-là, de même qu'il a dû par instants haïr sa femme, et l'autre, celui en qui nous avions alors la chance de ne pas croire. Aussi, ceci est-il un récit de haine bien plus que d'amour, et s'il m'arrive de dire du bien d'Henry ou de Sarah, l'on pourra me croire : je me défends d'avance contre toute accusation de parti pris, parce que mon orgueil professionnel me pousse à préférer l'expression de la vérité, fût-elle la "proche-vérité", à l'expression de ma "proche-haine".
C'était surprenant de voir Henry dans les rues par un temps pareil; il aimait son bien-être, et après tout - je le pensais du moins - il avait Sarah. Pour moi, le bien-être ressemble à un souvenir importun qui nous vient au mauvais endroit et au mauvais moment : lorsqu'on se sent très seul, mieux vaut l'inconfort. Il y avait trop de bien-être même dans la chambre à coucher-salon que j'occupais du côté sud, le mauvais côté, des Allées, au milieu de meubles sortis d'un passé qui n'était pas le mien. J'eus l'idée de me promener sous la pluie et d'aller boire un verre au café du coin. Le petit vestibule étroit était encombré de chapeaux et de pardessus inconnus - le locataire du second recevait des amis - et je pris par mégarde un parapluie qui ne m'appartenait pas. Puis, je tirai derrière moi la porte garnie de vitres de couleur et descendis avec précaution le perron démoli par une bombe en 1944 et qu'on n'avait jamais réparé. J'avais mes raisons pour me rappeler cet incident, et je savais que les affreux et épais vitraux de l'époque victorienne avaient supporté le choc de la même façon que nos grands-pères eux-mêmes l'auraient supporté.
Dès que j'abordai la traversée des Allées, je me rendis compte que je m'étais trompé de parapluie, car celui que je tenais prenait l'eau, laissant la pluie couler à l'intérieur du col de mon imperméable; c'est alors que j'aperçus Henry. J'aurais pu facilement l'éviter, il n'avait pas de parapluie et je pus voir à la lueur du réverbère que ses yeux étaient aveuglés par les gouttes d'eau. Les arbres noirs et sans feuilles n'offraient aucune protection; ils se dressaient autour des Allées comme des tuyaux de gouttières tronquées; la pluie ruisselait sur le bord du chapeau melon d'Henry et faisait des rigoles le long de son pardessus noir officiel de fonctionnaire civil. Si j'étais passé à côté de lui sans me retourner, il le m'aurait pas vu, et j'aurais pu, par surcroît, m'écarter un peu du trottoir; mais je parlai :
- Henry, lui dis-je, vous vous faites bien rare, et je vis son regard s'éclairer comme à la vue d'un vieil ami.
- Bendrix, dit-il affectueusement, et pourtant aux yeux du monde c'est lui qui, plus que moi, avait le droit de haïr.
- Que faites-vous là, sous la pluie, Henry?
Il y a des hommes qui nous inspirent l'irrésistible besoin de les taquiner : ceux dont les vertus ne sont pas les nôtres. ll répondit évasivement :
- Oh ! j'avais besoin de prendre l'air.
Nous fûmes balayés par une brusque bourrasque de vent et de pluie et il eut tout juste le temps de rattraper son chapeau qui fuyait en tourbillonnant vers les façades nord des Allées.
- Comment va Sarah? demandai-je parce qu'il eût paru étrange que je ne le fisse pas et pourtant rien ne m'aurait été plus agréable que d'apprendre qu'elle était malade, malheureuse, mourante. Je croyais à cette époque que toutes les souffrances qu'elle endurerait allégeraient les miennes, et que sa mort me rendrait la liberté, parce que je n'imaginerais plus toutes les choses qu'on imagine dans la situation humiliante où je me trouvais. Je pourrais même aimer ce pauvre serin d'Henry, pensai-je, si Sarah était morte.
- Oh ! elle passe la soirée je ne sais où, dit-il, réveillant par ces mots le démon qui s'agitait dans mon cerveau, au souvenir des jours où Henry avait dû faire cette même réponse à ceux qui l'interrogeaient alors que j'étais seul à savoir où se trouvait Sarah...."
"The Quiet American" (1955, Un Américain bien tranquille)
"Graham Greene n'est pas seulement le grand écrivain catholique consacré par le succès de son fameux roman La Puissance et la Gloire. Entré par effraction
dans le royaume de la Grâce (selon le mot de François Mauriac), cet ancien membre du Foreign Office a su, au travers de divertissements tels que cet Américain bien tranquille, dénoncer la guerre,
les dictatures et ce vice suprême : l'imbécillité. Il y met en scène la relation, au début des années 1950, entre un jeune Américain idéaliste et candide et un Anglais cynique, désabusé et rompu
aux pratiques de la colonisation. Adapté par deux fois au cinéma, le tableau qu'il nous livre ici du conflit vietnamien, est à la fois bouleversant et inoubliable." (Editions Robert
Laffont) Joseph L. Mankiewicz, en 1958, avec Audie Murphy et Michael Redgrave, et Phillip Noyce, en 2002, avec Michael Caine, Brendan
Fraser, en réalisèrent une adaptation cinématographique.
"Après le dîner, assis dans ma chambre de la rue Catinat, j'attendais Pyle. Il m'avait dit : "Je serai chez vous à dix heures au plus tard"; quand minuit eut sonné, je ne pus plus rester immobile et je descendis dans la rue. Un groupe de vieilles femmes en pantalon noir étaient accroupies sur le palier : on était en février et je suppose qu'elles avaient trop chaud pour regagner leur lit. Un conducteur de cyclo-pousse pédalait lentement en direction des quais du fleuve et j'apercevais des lampes allumées à l'endroit où l'on avait débarqué la dernière livraison d'avions américains. Pas le moindre signe de Pyle dans la longue rue. Bien entendu, me disais-je, il a pu être retenu à la Légation des Etats-Unis, pour une raison ou pour une autre, mais, dans ce cas, il n'aurait pas manqué de téléphoner au restaurant : il observait méticuleusement les petites courtoisies. J'allais rentrer chez moi quand je vis une jeune femme qui attendait sous l'entrée de la maison voisine. Je ne distinguais pas son visage, seuls étaient visibles le pantalon de soie blanche et la longue tunique fleurie, mais je la reconnus néanmoins. Elle avait si souvent attendu mon retour à ce même endroit et à cette même heure.
- Phuong, dis-je (ce nom signifie Phénix, mais rien n'est fabuleux à notre époque et rien ne renaît de ses cendres). Je savais, avant qu'elle ait eu le temps de me répondre, qu'elle attendait Pyle. "Il n'est pas ici."
- Je sais. Je t'ai vu seul à la fenêtre.
- Tu ferais mieux d'attendre en haut, dis-je. Il ne va pas tarder.
- Je peux l'attendre ici.
- Ce n'est pas prudent. Tu vas te faire ramasser par la police.
Elle me suivit jusque chez moi. Je pensai à plusieurs plaisanteries ironiques et désagréables que je pourrais faire, mais ni son anglais, ni son français n'étaient assez bons pour qu'elle pût en saisir l'ironie et, chose étrange, je n'avais aucun désir de la faire souffrir, ni même de me faire souffrir. Quand nous atteignîmes le palier, toutes les vieilles femmes tournèrent la tête et dès que nous fûmes passés, leurs voix s'élevèrent et sombrèrent, comme si elles chantaient en chœur.
- Que racontent-elles ?
- Elles se figurent que je reviens.
Dans ma chambre l'arbre que j'avais installé plusieurs semaines auparavant, pour le Nouvel An chinois, avait perdu presque toutes ses fleurs jaunes. Elles étaient tombées entre les touches de ma machine à écrire. Je les en extirpai.
- Tu es troublé, dit Phuong.
- Cela m'étonne de lui. Il est toujours si ponctuel.
J'ôtai ma cravate et mes chaussures et je m'allongeai sur le lit. Phuong alluma le poêle à gaz et mit l'eau à bouillir pour le thé. Cela aurait pu se passer six mois auparavant.
- Il a dit que tu allais partir bientôt, dit-elle.
- Peut-être.
- Il t'aime beaucoup.
- Je l'en dispense, dis-je.
Je vis qu'elle avait changé de coiffure, ses cheveux noirs et raides rejetés simplement sur les épaules. Je me rappelai qu'un jour Pyle avait critiqué sa façon compliquée de se coiffer qui - pensait-elle - convenait à la fille d'un mandarin. Je fermai les yeux et la retrouvai semblable à ce qu'elle était autrefois : elle était le sifflement de la vapeur, le cliquetis des tasses, elle était une certaine heure de la nuit, une promesse de repos.
- Il ne va pas tarder, dit-elle, comme si j'avais besoin d'être rassuré sur l'absence de Pyle. Je me demandai de quoi ils parlaient ensemble: Pyle prenait tout très au sérieux et il m'avait infligé ses conférences sur cet Extrême-Orient qu'il connaissait depuis autant de mois que moi d'années. La démocratie était un de ses autres dadas, et il avait des notions précises et exaspérantes sur ce que les Etats-Unis avaient fait et faisaient encore pour le monde. Phuong, d'autre part, était merveilleusement ignorante; si le nom de Hitler avait été cité dans une conversation, elle l'aurait interrompue pour demander qui il était. L'explication eût été d'autant plus difficile qu'elle n'avait jamais vu d'Allemands, ni de Polonais, et ne possédait qu'une connaissance très vague de la géographie de l'Europe; mais il va sans dire qu'elle était mieux renseignée que moi sur la princesse Margaret. Je l'entendis poser un tableau au pied du lit.
- Est-il toujours amoureux de toi, Phuong?
Lorsqu'on couche avec une Annamite, on a l'impression d'avoir un oiseau dans son lit : elles gazouillent et pépient sur l'oreiller. Je me rappelle avoir longtemps pensé que nulle de leurs voix ne chantait comme celle de Phuong. J'avançai la main et lui touchai le bras. Leurs os, en outre, sont aussi frêles que des os d'oiseaux.
- Réponds, Phuong.
Elle rit et j'entendis qu'elle frottait une allumette.
- Amoureux?
Peut-être était-ce une expression qu'elle ne comprenait pas.
- Veux-tu que je te fasse une pipe ? demanda-t-elle.
Quand je rouvris les yeux, elle avait allumé la lampe et le plateau était déjà préparé. La lueur de la lampe mettait sur sa peau des reflets d'ambre sombre, tandis qu'elle penchait sur la flamme un front que fronçait l'attention, pour chauffer la petite boule d'opium en faisant tourner son aiguille.
- Pyle ne fume toujours pas ? lui demandai-je.
- Non.
- Tu devrais le faire fumer, sinon il ne reviendra pas.
C'est une superstition chez elles qu'un amant fumeur d'opium revient toujours, fût-ce de France. Il se peut que la puissance virile soit diminuée par l'opium, mais elles préfèrent toutes un amant fidèle à un amant puissant. Elle malaxait la petite boule de pâte brûlante sur le bord convexe du fourneau de la pipe et je humais l'odeur de la drogue. Aucune autre odeur ne lui ressemble. A côté du lit, mon réveil marquait minuit vingt, mais déjà mon angoisse cédait. Pyle commençait à disparaître..."
"Our Man in Havana" (1958, Notre agent à La Havane)
Le roman se déroule à Cuba, sous la dictature de Batista, avant l'arrivée au pouvoir de Fidel Castro. Le personnage principal est un anglais, Jim Wormold,
qui vend des aspirateurs à La Havane, et incapable de refuser quoique ce soit, se laisse enrôler comme agent des services secrets britanniques. Abandonné par sa femme, il élève seul Milly, une
jolie adolescente aux goûts dispendieux. Wormold n'aura aucune activité d'espionnage, et se contentant, pour amasser un petit pécule, d'inventer des missions et des recrutements d'agents
imaginaires. Cette aventure tragique et burlesque à la fois, cruelle aussi dans son dénouement, inspira à Carol Reed un classique du cinéma avec Alec Guinness dans le rôle de l'agent et
Maureen O'Hara (Our Man in Havana, 1966)...
"Travels with My Aunt" (1969, Voyage avec ma tante)
« Je rencontrai ma tante Augusta pour la première fois en plus d'un demi-siècle aux obsèques de ma mère. Ma mère avait près de quatre-vingt-six ans à sa
mort ; ma tante était sa cadette de quelque onze ou douze ans. Deux ans plus tôt j'avais quitté la banque avec une retraite suffisante et une agréable "enveloppe". La Westminster nous avait
absorbés et ma succursale faisait double emploi. De l'avis général, j'avais de la chance. Pour ma part, je trouvais le temps long. Je n'ai jamais pris femme ; j'ai toujours mené une existence
paisible ; sauf un penchant pour les dahlias je n'ai pas de violon d'Ingres. Autant de raisons qui ajoutaient aux obsèques de ma mère un brin de piquant nullement déplaisant. » L'Orient-Express,
Paris, Venise, Milan, Istanbul... Lorsque Tante Augusta fait irruption, tel un tourbillon, dans la vie d'Henry, celui-ci se laisse entraîner dans une folle poursuite à travers le monde. Un roman
éblouissant, bijou d'humour et de cocasserie, de la première à la dernière page." (Editions Robert Laffont)
"JE rencontrai ma tante Augusta pour la première fois en plus d'un demi-siècle aux obsèques de ma mère. Ma mère avait près de quatre-vingt-six ans à sa mort; ma tante était sa cadette de quelque onze ou douze ans. Deux ans plus tôt j'avais quitté la banque avec une retraite suffisante et une agréable "enveloppe". La Westminster nous avait absorbés et ma succursale faisait double emploi. De l'avis général j'avais de la chance. Pour ma part je trouvais le temps long. Je n'ai jamais pris femme ; j'ai toujours mené une existence paisible; sauf un penchant pour les dahlias je n'ai pas de violon d'lngres. Autant de raisons qui ajoutaient aux obsèques de ma mère un brin de piquant nullement déplaisant.
Mon père était mort depuis plus de quarante ans. Entrepreneur en bâtiment. d'un naturel somnolent. il avait coutume de faire de petites siestes, l'après-midi. en toute sorte de lieux surprenants. Et ce, à l'irritation de ma mère, femme énergique et qui aimait à le débusquer pour troubler son repos. Enfant, pénétrant dans la salle de bain (nous demeurions alors à Highgate). je me souviens d'y avoir trouvé mon père dormant tout habillé dans la baignoire. Je suis assez myope et crus d'abord à un pardessus nettoyé par ma mère, puis j'entendis mon père chuchoter : "Pousse le verrou intérieur avant de sortir." Il était trop paresseux pour s'arracher à la baignoire, et trop endormi, j'imagine, pour mesurer le caractère totalement irréalisable de son ordre. Il y eut aussi l'époque où, ayant à construire un groupe d'appartements à Lewisham, il s'offrait ses petits sommes dans la cabine de la grue géante, et jusqu'à son réveil, le bâtiment n'allait plus. Ma mère, à qui l`altitude ne faisait pas peur, grimpait aux échelles jusqu'en haut des échafaudages dans l'espoir de l'y découvrir, alors qu'il y avait autant de chances de le retrouver au fond des excavations du futur garage souterrain. J 'avais toujours cru leur couple normalement heureux : leurs rôles jumeaux - la chasseresse et la proie - leur convenaient, je pense; car ma mère. dans les premières images que je pus me former d'elle, avait pris à la longue un port de tête constamment en alerte et une façon méfiante de trotter que je comparais à ceux d'un chien de chasse. Qu'on me pardonne ces évocations du passé : rien ne leur est favorable comme des obsèques, à cause de toute cette vague attente qui n`en finit pas. Le service avait lieu dans un crématorium fort connu. L'assistance était assez maigre, mais on la sentait aux aguets, parcourue de ce léger frémissement d'expectative que l'on n'éprouve jamais au bord d'une tombe. Et si les portes du four allaient refuser de s'ouvrir? le cercueil, se coincer sur le chemin de la fournaise? Derrière moi, j'entendis une voix. distinctement claire et vieille, dire : "Une fois, j'ai assisté à une incinération prématurée". C'était - non sans peine j'établis la ressemblance avec une image de l'album de famille - ma tante Augusta, arrivée en retard et vêtue assez comme notre chère et regrettée reine Mary se fût peut-être habillée si elle eût été encore de ce monde et eût tant soit peu sacrifié à la mode actuelle. Je fus surpris parle rouge éclatant de ses cheveux monumentalement échafaudés, et par ses deux dents de devant, très grandes, dont la vitalité semblait l'apparenter à l'homme de Néanderthal. Quelqu'un fit : «Chutl» et un clergyman entama une prière qui devait être de son cru; je ne l'avais jamais entendu réciter à aucun autre service funèbre, et Dieu sait si j'en ai subi en mon temps. On s'attend qu'un directeur de banque rende les derniers devoirs à n'importe quel vieux client qui n'est pas, comme nous disons, « en rouge »; et de toute manière. j'ai un faible pour les obsèques. C'est l'occasion pour les gens de se montrer généralement sous leur meilleur jour, sérieux et sobres, et optimistes quant à leur immortalité personnelle.
Les obsèques de ma mère se déroulèrent sans la moindre anicroche. En bonne économie, on récupéra les fleurs répandues sur le cercueil. lequel, sur la simple pression d'un bouton, nous quitta et glissa hors de notre vue. Après quoi, dehors. dans la lumière inquiète. je serrai la main à bon nombre de neveux, nièces et cousins que je n'avais pas vus depuis des années et que j'étais incapable d'identifier. Il était convenu que je devais attendre les cendres; ce que je fis en conséquence, tandis que la cheminée du crématorium fumait doucement au-dessus des têtes.
- "C`est sûrement toi Henry, dit Tante Augusta. en me considérant d'un air pensif et de ses yeux d'un bleu de mer profond.
- Oui, dis-je. et c'est sûrement vous Tante Augusta.
- Cela fait bien longtemps que je n'avais eu signe de vie de ta mère. me dit-elle. J'espère qu'elle a eu une mort facile.
- Mon Dieu, oui, vous savez. à cet âge... le cœur s'arrête. C`ést tout. Elle est morte de vieillesse.
- De vieillesse ? Elle n'avait que douze ans de plus que moi!" se récria Tante Augusta d'un ton accusateur."
Nancy Mitford (1904-1973)
Née à Londres, Nancy Mitford est l'une des célèbres six filles excentriques du second baron Redesdale qui vont défrayer la chronique mondaine du Londres des
années 1940. Diana Mitford (1910-2003) épousa le dirigeant fasciste britannique Oswald Mosley, Unity (1914-1948) fut tant obsédée par Adolf Hitler qu'elle émigra en Allemagne, Jessica (1917-1996)
épousa la cause républicaine pendant la guerre d'Espagne puis émigra aux Etats-Unis, et si Pamela (1907-1994) vécut une existence paisible, Nancy devint une romancière à succès. Comme Evelyn
Waugh, Nancy Mitford dans les années 1920, attire la bonne société intellectuelle pendant la Seconde Guerre mondiale dans sa librairie de Curzon Street. Après un premier roman, "Highland Fire"
(1931), elle connaît le succès en 1945 avec "The Puirsuit of Love". Entretemps, depuis 1945, elle vit en France et s'entiche du XVIIIe siècle au point d'écrire sur le sujet nombre de biographies.
Dans "The Pursuit of Love" comme dans "Love in a cold climate", Nancy Mitford met en scène une excentrique famille, les Raddlett, inspirée de ses propres parents et soeurs, et ridiculisent les
aristocrates anglais à travers la famille Montdore, snobs autoritaires qui s'érigent en arbitres des goûts et conventions, avec un ton satirique et un réalisme dans l'écriture qui firent son
succès. "The Blessing" (1951), "Don't Tell Alfred" (1960)., ainsi que l'anthologie "Noblesse Oblige. An Enquiry into the Identifiable Characteristics of the English Aristocracy (1956) sont
devenus des classiques du genre.
The Pursuit of Love (1945, La Poursuite de l'amour)
"Désireuses de conquérir leur destin, deux jeunes aristocrates anglaises aspirent à l’amour comme elles s’éprendraient d’un rêve. Tandis que l’une se
précipite vers le mariage avec fougue, la seconde guette patiemment l’élu qui viendra bouleverser sa vie. Dans le trouble de l’avant-guerre débute alors un long apprentissage sinueux et
passionné, à jamais universel."
Love in a cold climate (L'Amour dans un climat froid)
"Chronique brillante, spirituelle et gaie, émouvante aussi, de l’aristocratie anglaise de l’immédiat avant-guerre. Débutantes rose bonbon ou
douairières, les « Honorables » ladies de Nancy Mitford n’ont décidément que le grand amour à l’esprit. Passés les premiers émois sentimentaux de La Poursuite de l’amour, c’est avec délectation
que l’on retrouve Fanny et Polly, très chics jeunes filles de l’aristocratie anglaise. Paisiblement mariée, la première narre les rocambolesques démêlés conjugaux de la seconde, tandis que sa
mère, Lady Montdore, est victime du démon de midi."
"Lady Montdore loved anybody royal. It was a genuine emotion, quite disinterested, since she loved them as much in exile as in power, and the act of curtsying was the consummation of this love. Her curtsies, owing to her frame, did not recall the graceful movement of wheat before the wind. She scrambled down like a camel, rising again backside foremost like a cow, a sdtrange performance painful it might be supposed to the performer, the expression on whose face, however, belied this thought..."
"Lady Montdore adorait les têtes couronnées, quelles qu'elles soient. Son émotion était sincère, parfaitement désintéressée, puisqu'elle les aimait autant en exil qu'au pouvoir, et faire la révérence était la consommation de cet amour. Ses révérences, du fait de sa corpulence, ne rappelaient pas exactement le mouvement gracieux du blé dans le vent. Elle s'effondrait à la manière d'un chameau, puis se relevait le postérieur le premier comme une vache, et si l'on pouvait supposer, à regarder cet étrange spectacle, qu'elle souffrait, l'expression de son visage n'en reflétait pas moins cette idée..."
"Pigeon Pie" (1940, Tir aux pigeons)
"Au moment où éclate la Seconde Guerre mondiale, Lady Sophia Garfield rêve de devenir une belle espionne. C’était sans imaginer qu’elle serait confrontée à
une troupe d’officiers allemands dans sa propre maison… Et encore moins qu’ils tueraient sa domestique, et prendraient son bouledogue adoré en otage…Mais ne pouvant passer son temps à démasquer
des ennemis, Sophia conserve ses loisirs aristocratiques. Elle va ainsi régulièrement prendre le thé au Ritz avec ses amis farfelus et échafaude avec malice des plans pour séduire le fringant
Rudolph Jocelyn et en éloigner sa rivale, la princesse Olga Gogothsky."